Module 2. La forêt

Introduction

La forêt  est présente de près ou de loin dans la vie de tous les habitants de la planète. Elle assure non seulement les éléments essentiels à leur survie comme la nourriture, les matériaux de construction, etc., mais elle représente également un lieu de loisir et de ressourcement pour de nombreux utilisateurs. Considérant son importance pour l’humanité, il apparaît nécessaire de mieux connaître les forêts. Ce module vise tout d’abord à donner un aperçu de l’importance des forêts dans le monde. Il s’attardera ensuite sur ses particularités régionales, ses usages ainsi que sur l’influence des activités humaines sur son intégrité.

Il n’existe pas de définition unique d’une forêt étant donné qu’elle varie selon les particularités régionales, par exemple le climat et la topographie, et que les gouvernements ajustent leur définition en fonction des forêts présentes sur leur territoire. Par exemple, au Sahel, une forêt se définit comme toute surface avec 10 % ou plus de recouvrement par les arbres et les arbustes alors qu’en Europe, ce seuil est de 20 %.

Devant cette variété de définitions, les travaux de la FAO prennent une valeur particulière, car cet organisme est notamment chargé de faire le bilan de l’état et de l’utilisation des forêts dans le monde. La FAO définit la forêt comme suit :

« Terres occupant une superficie de plus de 0,5 hectare avec des arbres atteignant une hauteur supérieure à 5 mètres et un couvert arboré de plus de 10 pour cent, ou avec des arbres capables d’atteindre ces seuils in situ »

Cette définition exclut les terres à vocation agricole ou urbaine prédominante (Anonyme, 2004). Dans ses notes explicatives, la FAO mentionne que sa définition inclut les plantations utilisées à des fins forestières ou de protection.

2.1 L'importance des forêts dans le monde

Selon de récentes estimations de la FAO (FAO, 2009), la superficie totale des forêts dans le monde représente un peu moins de 40 millions de kilomètres carrés, soit 30 % de la superficie totale des terres émergées de la planète.

Comme en fait foi la figure 2.1, la superficie forestière n’est pas répartie de façon égale parmi les pays. La Russie possède la plus grande part de forêt avec 20 % de celle-ci, suivi du Brésil, du Canada et des États-Unis avec 12 %, 8 % et 8 % respectivement. De façon générale, les dix pays qui possèdent le plus de forêts représentent à eux seuls les deux tiers de la superficie forestière totale. De plus, sept pays ou territoires ne possèdent pas de forêt et, dans 57 autres, les forêts occupent moins de 10 pour cent de la superficie totale des terres (FAO, 2005).

Figure 2.1 Les dix pays présentant les plus grandes superficies forestières au monde.

Source : Adapté de FAO (2005) .

2.2 Les particularités des forêts

Les variations de températures et de précipitations qui ont lieu de l’équateur vers les pôles Nord et Sud influencent en grande partie le type de forêt que l’on peut rencontrer. Comme il est illustré à la figure 2.2, les forêts se classent en trois grands biomes :

Figure 2.2 Biomes forestiers à travers le monde.

Source : Tiré de FAO (2001) .

2.2.1 Les forêts tropicales et subtropicales

Les forêts tropicales se trouvent près de l’équateur entre le 23,5e degré de latitude Nord et le 23,5e degré de latitude Sud, soit le nord de l’Amérique du Sud et la région adjacente de l’Amérique centrale, l’ouest de l’Afrique équatoriale et la région indomalaise (Barnes, 1998). Les forêts tropophiles (ou tropicales et subtropicales sèches), quant à elles, sont présentes dans quelques régions le long des tropiques du Cancer et du Capricorne (par ex. l'ouest de l'Australie, le sud de la Chine, l'ouest de l'Inde, le sud-ouest du Mexique, au sud du Brésil et au Madagascar).

Ces forêts se caractérisent par un climat chaud (> 20 ºC) et relativement constant. Le régime des précipitations varie selon les régions. Certaines régions profitent d’une distribution uniforme de pluie avec des niveaux annuels qui peuvent dépasser 2 000 millimètres, bien que la plupart des écosystèmes soient affectés par une période plus ou moins longue de sécheresse. Les forêts tropicales humides abritent la plus grande diversité d’espèces et, selon certaines estimations, elles comprennent environ la moitié de la biodiversité de la planète.

À titre d’exemple, on a observé au Costa Rica qu’une placette-échantillon de 100 m2 comptait 233 plantes, dont des semis de 73 espèces d’arbres (Barnes, 1998). À titre de comparaison, une telle placette en forêt boréale ou dans les forêts sèches peut compter une seule espèce d’arbre.

Photo 2.1 Forêt tropicale sèche de Trinidad et Tobago durant la saison sèche.

Source : Wikimedia .

Photo 2.2 Forêt tropicale humide guyanaise.

Source : Wikipedia .

2.2.2 La forêt tempérée

La forêt tempérée forme une bande sinueuse et discontinue entre la forêt boréale et les forêts tropicales et subtropicales. On retrouve cette forêt dans l’est de l’Amérique du Nord, au nord-est de l’Asie, en Europe centrale et de l’Ouest ainsi qu’au sud du Chili et au sud-est de l’Australie (Anonyme, 2000; 2007).

Le climat de cette forêt se distingue généralement par un hiver avec des températures annuelles variant de -30 °C à 30 °C, ce qui entraîne, en pratique, des périodes sans gel allant de 4 à 6 mois selon les régions. La seule exception à cette règle est la forêt tempérée humide dont le climat océanique comme celui rencontré au nord-ouest de l'Amérique du Nord crée des hivers dont les gels sont limités ou absents (Anonyme, 2007).

La forêt tempérée compte cinq grands types de forêts qui diffèrent principalement par leur patron annuel de précipitations et la quantité de précipitations qu’elles reçoivent.

Photo 2.3 Forêt tempérée de résineux des îles San Juan dans l'État de Washington.

Source : Wikipedia .

Photo 2.4 Vieille forêt de hêtres européens (Fagus sylvatica L.) dans la forêt de Soignes près de Bruxelles.

Source : Wikipedia .

2.2.3 La forêt boréale

La forêt boréale est le plus grand biome terrestre. Elle forme une bande presque continue de forêts entre le 50e et le 60e parallèle touchant ainsi l’Amérique du Nord et l’Eurasie (Anonyme, 2007). Cette forêt est récente dans l’histoire de la Terre, car elle s’est installée à la suite du retrait des glaciers il y a au plus 10 000 ans (Barnes, 1998). Il n’existe pas d’équivalent de la forêt boréale dans l’hémisphère sud.

Le climat de ce biome diffère de celui de la forêt tempérée par des étés courts, humides et chauds et par des hivers longs, secs et froids avec des températures annuelles moyennes se situant entre –1 °C et 0 °C (Anonyme, 2007).

Photo 2.5 Forêt d’épinettes de Norvège près de Ånnaboda en Suède.

Source : Wikimedia .

Photo 2.6 Paysage d'automne dans le parc Yukon Flats National Wildlife Refuge.

Source : U.S. Fish and Wildlife Service 

2.3 Les produits et les services provenant des forêts

Les produits et les services  provenant des forêts sont parmi ceux les plus utilisés à travers le monde. Ceci s’explique notamment par l’omniprésence de la forêt dans la presque totalité des régions habitées du globe.

Les bénéfices que l’on retire des forêts se classent en trois catégories, soit le bois, les produits forestiers non ligneux et les services écologiques.

2.3.1 Le bois et la fibre

La popularité du bois provient en grande partie de sa facilité à être exploité et à être transformé. Ces particularités font en sorte que l’on retrouve sur le marché une large gamme de produits.

On compte parmi ces produits le bois débité en dimensions de toutes sortes que l’on utilise autant dans la construction domiciliaire et commerciale que pour la fabrication de produits de tous les jours comme les meubles, les ustensiles, les instruments de musique, etc. La transformation du bois en pâte et en papier permet, quant à elle, la production de papiers destinés aux communications, par exemple les journaux, les magazines, etc., et la production de produits d’hygiène personnelle comme le papier hygiénique et les couches jetables pour bébé.

On estime en 2003 que le commerce des produits du bois atteignait 150 milliards de dollars US et que cette industrie employait jusqu’à 60 millions de travailleurs, dont 80 % d’entre eux vivaient dans des pays en voie de développement (Mery, 2005; chapitre 9 du volume 1 du MEA ).

Le bois et le charbon de bois servent également à chauffer les habitations et à cuisiner. On compte également des usages commerciaux comme dans les boulangeries, dans la fabrication de briques, dans le fumage des aliments et dans le séchage du tabac et du thé. Avec l’augmentation du prix des produits pétroliers et les mesures de réduction d’émission de gaz à effet de serre, l’utilisation du bois devient de plus en plus populaire dans les pays industrialisés et dans les pays en voie de développement (Smart, 2005; chapitre 8 du volume 3 du MEA ).

Près de la moitié des arbres coupés dans le monde, soit 1,8 milliard de mètre cubes, sont destinés à ces usages (Mery, 2005).

2.3.2 Les produits forestiers non ligneux

La forêt constitue une source de nourriture et de produits de première nécessité pour les populations qui vivent dans ou près de ces écosystèmes.

On compte parmi ces produits des fruits, des champignons ainsi que les remèdes que des milliards de personnes utilisent sur une base presque exclusive (Mery, 2005). Les animaux présents dans ces forêts sont autant une source de nourriture qu’une source de matériaux de base (peaux, fourrures, laine) avec lesquels sont fabriqués de nombreux produits pour une utilisation personnelle, comme les vêtements et les chaussures, ou pour la vente.

De façon générale, la forêt fournirait environ 5000 produits commerciaux et une centaine de différents services (chapitre 9 du volume 1 du MEA ).

Photo 2.7 Bleuets.

Source : Wikipedia .

Visionnez une vidéo  sur la cueillette des champignons par les Premières Nations dans les forêts de l'Abitibi-Témiscamingue. En même temps, en valorisant les produits forestiers non ligneux, on cherche à développer l'économie régionale en plus de protéger le territoire contre les coupes forestières comme on les connait actuellement.

2.3.3 Les services écologiques

La forêt joue un rôle important dans la santé des collectivités humaines et des autres écosystèmes.

Plus des trois quarts de l’eau douce proviennent de zones forestières et la présence du couvert forestier permet à la fois de maintenir le niveau des précipitations et de réguler le débit et la qualité de l’eau (Mery, 2005). La forêt contribue également à protéger les terres contre l’érosion exercée par le vent et l’eau et favorise par conséquent le maintien de l’intégrité des écosystèmes. Cette protection permet d'offrir un habitat et un refuge à de nombreuses espèces qui favoriseront non seulement la santé des écosystèmes, mais également la présence continue des services auxquels nous sommes habitués.

Ces services varient d’un endroit à l’autre et même d’une période à l’autre. Dans certains pays en voie de développement et dans l’Ouest canadien, les forêts servent de lieu de pâturage pour le bétail. Dans d’autres régions, on apprécie les forêts pour leur valeur esthétique et les possibilités récréatives qu’elles offrent. À titre d’exemple, les États-Unis, depuis 1953, ont doublé leur superficie consacrée à des parcs, à des aires protégées ou à d'autres milieux du genre. C’est ainsi que 21 millions d’hectares de forêt productive ont vu leur vocation changer au cours des années. Enfin, pour plusieurs populations autochtones et les sociétés traditionnelles, la forêt joue un rôle culturel et spirituel important dans les traditions et dans certains cas, fait parti intégrante de leur culture (chapitre 9 du volume 1 du MEA ).

On estime que la valeur annuelle des services des forêts totalise 4,7 trillions $ (1 x 1018), bien que cette estimation soit controversée (chapitre 9 du volume 1 du MEA ). Avec l’importance de plus en plus grande des effets des changements climatiques, les forêts se voient attribuer un rôle de plus en plus important comme réservoir pour la séquestration du carbone. Des mesures telles que le reboisement, le report de l’âge d’exploitation des forêts, la substitution de produits et la production de biomasse pour la bioénergie sont des mesures que le monde forestier peut entreprendre afin de capturer le carbone atmosphérique ou de diminuer ses émissions. À court terme, cependant, une réduction de la déforestation jouerait un rôle plus important que la plantation étant donné que cette activité représente la source de carbone la plus importante provenant des forêts (Nabuurs, 2007).

Photo 2.8 Safari à dos d’éléphant (écotourisme), une activité très populaire en Asie (ex. Thaïlande, Inde, Népal, Sri Lanka).

Source : Tendances-Tourisme .

En somme, les produits et les services que l’on tire des forêts comblent plusieurs besoins de base des populations qui côtoient cet écosystème. Les forêts permettent à ces populations de se nourrir, de se loger, de se vêtir et même de se guérir. Elles représentent également un moteur économique incontournable pour la majeure partie des pays du globe.

Figure 2.3 Synthèse de quelques produits et services tirés des forêts.

Source : Adapté du chapitre 21 du volume 1 du MEA .

2.4 L’évolution de l’état des forêts dans le monde et les acteurs responsables des changements

Les activités humaines ont toujours eu un impact sur l’environnement. Bien qu’à l’origine cet impact fût localement très sévère, il est permis de croire que celui-ci était limité à quelques secteurs de faible superficie étant donné le faible niveau de population. Depuis ce temps, la perte de forêts fut généralement graduelle pour ensuite s’accélérer depuis le début de l’ère industrielle. Les trois quarts de ces pertes ont eu lieu au cours des deux derniers siècles. Des changements importants furent observés dans les forêts tempérées et plus récemment dans les forêts tropicales (Barber, 2005).

2.4.1 Les changements récents

On estime que 10 millions d’hectares de forêts tropicales sont disparus chaque année depuis quarante ans, soit une superficie plus grande que celle de la Corée du Sud, du Guatemala ou du Portugal. Plus récemment, au cours de la décennie 1990-2000, 14,2 millions d’hectares de forêts par année ont changé de vocation selon la FAO (figure 2.4). Du côté des forêts non tropicales, on observe la situation inverse où leur superficie augmente de 1,7 million d’hectares par année en raison principalement de l’extension naturelle des forêts (figure 2.4).

Figure 2.4 Changement annuel de superficie de forêts tropicales et non tropicales entre 1990 et 2000 (la conversion indique les aires de forêt naturelle converties en plantation alors que l'expansion donne les superficies régénérées naturellement en forêt).

Source : Tiré de chapitre 21 du volume 1 du MEA .

Une évaluation de la superficie des forêts entre 2000 et 2005 (FAO, 2005) montrent un ralentissement du taux annuel de déforestation. Les chiffres présentés dans ce rapport sont les mêmes que ceux présentés dans le plus récent rapport de la FAO (Situation des forêts du monde, 2009). Environ 13 millions d’hectares de forêts par année ont vu leur affectation changer entre 2000 et 2005 contre 14,2 millions d’hectares par année lors de la décennie 1990-2000.

Comme l’indique la figure 2.5, l’Amérique du Sud subit des pertes importantes où le Brésil à lui seul représente des diminutions d’un peu plus de 30 000 km2 par année (figure 2.6). L’Afrique demeure toute proportion gardée le continent le plus touché. Bien que ce continent abrite un peu plus de 21 % des forêts de la planète, on y compte un peu moins du tiers des pertes en forêts.

Figure 2.5 Changements nets de superficie forestière pour la période 2000-2005.

Source : Adapté de la FAO (2006) .

Figure 2.6 Comparaison des 20 pays avec les plus grands changements de superficie forestière par année durant la période 2000-2005.

Source : Données provenant de la FAO (2006) .

Lorsque l’on considère les terres reboisées de façon naturelle ou artificielle, le taux de déforestation annuel net passe de 8,9 millions d’hectares pour la période 1990-2000 à 7,3 millions d’hectares entre 2000-2005. Les plus grands gains en superficie sont observés en Asie (figure 2.7). La politique de reboisement à grande échelle de la Chine y joue pour beaucoup avec un taux de reboisement de l’ordre de 15 000 kilomètres carrés par année (figure 2.7) (FAO, 2005).

Figure 2.7 Comparaison des dix taux de reboisement les plus importants selon les derniers résultats de la FAO (période 2000-2005).

En somme, on estime que la forêt a perdu de 20 à 40 % des 6,2 milliards d’hectares qu’elle couvrait il y a 8000 ans (figure 2.8). Cette perte de superficie et les modifications résultant de l’exploitation des ressources dans les forêts font en sorte que 70 % des forêts actuelles peuvent être considérées comme naturelles, 20 % d’entre elles comme semi-naturelles (perturbations et quelques interventions humaines) et 10 % comme anthropogéniques (établies ou substantiellement transformées par les humains).

D’un point de vue géographique, les forêts ont complètement disparu de 25 pays tandis que 29 autres ont perdu plus de 90 % de leur couvert forestier. L’Europe est le continent avec la plus petite proportion de forêt originelle avec 50 à 70 % du couvert initial alors que 70 % de ces forêts sont encore présentes en Amérique du Nord. Enfin, 76 pays ne possèdent plus de forêts primaires (chapitre 9 du volume 1 du MEA ).

Figure 2.8 Évolution de l’état des forêts depuis les 8000 dernières années.

Source : L'Institut mondial des ressources .

2.4.2 Les plantations vs les forêts naturelles

La diminution du taux de déforestation attribuable aux plantations semble au premier abord un gain environnemental. En effet, ces plantations remplissent certaines fonctions des forêts naturelles, dont la protection contre l’érosion par le vent et l’eau ainsi que la création d’un couvert protecteur pour plusieurs organismes. Bien que ces gains ne soient pas négligeables, ils cachent une autre réalité. Au point de vue de la faune, les plantations avec une seule espèce d’arbre représentent un appauvrissement des habitats étant donné qu’elles forment le plus souvent un couvert dense et uniforme qui se trouve sur un seul étage. Cette homogénéité fait en sorte que les besoins en nourriture et en abri de plusieurs organismes forestiers ne sont pas comblés et la majorité d’entre eux quitte ces lieux.

Les plantations représentent un avantage réel si leur gain de productivité permet de préserver de plus grandes superficies de forêts naturelles. Une telle stratégie est déjà employée dans plusieurs régions du monde et fera l’objet d’une étude de cas dans la section sur la biodiversité.

2.4.3 Les acteurs responsables de la modification des forêts

Dans la section 1.3, nous avons présenté les grands acteurs des changements écosystémiques. Voyons maintenant les acteurs responsables de la modification des différentes forêts.

Les acteurs en forêt tropicale

Plusieurs acteurs influencent la déforestation de la forêt tropicale. Ces acteurs ont un effet direct ou indirect sur ces forêts selon le cas. Les acteurs ayant un impact direct sur la déforestation sont l’agriculture, la coupe de bois ainsi que l’établissement et l’agrandissement d’infrastructures. Le tableau 2.1 présente quelques-unes des activités qui caractérisent ces acteurs.

Tableau 2.1 Exemples d’activités ayant un impact direct sur la déforestation de la forêt tropicale

AgricultureCoupe de boisÉtablissement et agrandissement d’infrastructures
Le développement agricole à des fins commerciales (ex. le soja) et de subsistance; le pâturage (ex. la viande); les plantations (ex. le café, le cacao).Les coupes intensives à des fins commerciales, pour le bois de chauffage et le charbon de bois; les coupes illégales.Le réseau de transport (ex. les routes, le réseau ferroviaire); l'urbanisation; l'extraction des ressources (ex. le pétrole, les minéraux); les infrastructures industrielles (ex. les barrages hydroélectriques).

Les acteurs indirects, quant à eux, enclenchent des processus sociaux qui augmentent l’effet des acteurs directs. Ces facteurs se classent en cinq grandes catégories : économie, politique et institution, technologie, culture et sociopolitique, ainsi que démographie. Dans la pratique, la complexité des situations fait en sorte que l’on doit considérer une combinaison d’acteurs afin de comprendre les causes de la déforestation.

Les acteurs en forêt tempérée et boréale

Comme nous l'avons mentionné précédemment, les forêts tempérées et boréales ont vu leur superficie augmenter au cours des 40 dernières années. Une combinaison d’acteurs permet également de bien comprendre cette évolution. Des facteurs politiques et sociaux tels que la protection contre les feux de forêts, les attentes de la population face à la forêt (ex. les loisirs) et l’abandon de terres agricoles de faible qualité ont permis à ces forêts de prendre de l’expansion. En contre-partie, la pollution et les épidémies d’insectes ont diminué leur qualité (chapitre 9 du volume 1 du MEA ).

Le rôle du feu et des changements climatiques

Les superficies de forêts affectées par le feu tendent à augmenter selon le chapitre 21 du volume 1 du MEA , et ce, autant dans les forêts tropicales que dans les forêts non tropicales. Ces feux ont des impacts économiques et sociaux importants en matière de perte de bois et de carbone, d’interruption des activités humaines, comme le transport, et de problèmes de santé respiratoire.

Bien que cette perturbation régule le fonctionnement des forêts boréales, la présence du feu ne fait pas partie de la dynamique naturelle de la forêt tropicale humide. On pourrait donc, à plus long terme, observer une dégradation de ce biome si la situation perdure. Les changements climatiques ne se limiteront pas uniquement à une augmentation des températures. Le niveau des précipitations demeurera le même ou diminuera selon les régions tandis que la fréquence des événements extrêmes et les sécheresses augmentera.

  • Lisez la revue de littérature de C. D. Allen et coll. (2010) sur la réponse des forêts aux changements climatiques : Allen, C. D. et coll. 2010. A global overview of drought and heat-induced tree mortality reveals emerging climate change risks for forests. Forest Ecology and Management 259 : 660-684. Accédez à cet article en utilisant la Réserve électronique du cours  de la bibliothèque de l'Université TÉLUQ.

Ces changements modifieront la distribution et le fonctionnement des forêts. Les écosystèmes normalement rencontrés dans les régions plus sèches ou plus chaudes gagneront localement en importance. Les forêts restantes pourraient prendre un nouveau visage étant donné les changements de végétation et d’animaux qu’entraîneront les modifications de climat et l’occurrence d’événements extrêmes.

Il est fort à croire que les changements climatiques affecteront l’offre de services écologiques par les forêts et des ajustements seront nécessaires dans leur gestion et leur protection afin de limiter les impacts de ces changements (chapitre 9 du volume 1 du MEA ).

2.5 Les impacts de l’exploitation forestière

Une bonne partie des progrès de l’humanité fut possible grâce à la conversion de territoires forestiers en d’autres utilisations comme l'agriculture. Une exploitation forestière trop intensive, que ce soit par la quantité d’arbres prélevés ou par la taille des aires de coupe, a des effets autant sur les écosystèmes forestiers que sur les populations qui en dépendent.

2.5.1 Les impacts sur les écosystèmes forestiers

Les travaux liés à l’exploitation forestière ont un impact sur les sols. La récolte de bois diminue l’interception et la transpiration de l’eau par les arbres. Cette diminution peut entraîner une augmentation du ruissellement de l’eau sur la surface du sol et, par le fait même, augmenter les risques d’érosion. Ce phénomène devient plus important lorsque la machinerie utilisée lors de la coupe et le transport du bois perturbe la couche de matière organique qui recouvre le sol. Ce phénomène d’érosion a deux effets négatifs sur les écosystèmes. Il diminue la productivité des forêts par la perte de sol fertile et peut entraîner des sédiments, par exemple les particules de sol vers les cours d’eau. La présence de zones tampons le long des cours d’eau peut enrayer une partie du problème.

  • Lisez l'article scientifique de A. D. Ziegler et coll. (2006) sur les effets bénéfiques des lisières boisées riveraines sur l’hydrologie des cours d’eau après coupe en Thaïlande : Ziegler, A. D. et coll. 2006. Reduction of stream sediment concentration by a riparian buffer : Filtering of road runoff in disturbed headwater basins of Montane Mainland southeast Asia. Journal of Environmental Quality 35 : 151-162. Accédez à cet article en utilisant la Réserve électronique du cours  de la bibliothèque de l'Université TÉLUQ.

Le passage de la machinerie sur les aires de coupe a également pour effet de compacter le sol. Un sol compacté est moins productif étant donné que les racines peuvent difficilement s’y frayer un chemin. Il limite l’apport d’oxygène dont les racines et les organismes décomposeurs ont besoin pour vivre et ralentit l’absorption de l’eau dans le sol.

L’arrivée de sédiments dans l’eau modifie plusieurs facettes de la vie des poissons : (1) les sédiments affectent directement les poissons en bloquant et en irritant leurs branchies ainsi qu’en détruisant la muqueuse protectrice qui recouvre leur corps; (2) ils entraînent une perte de visibilité et affectent le comportement des poissons en influençant leurs pratiques d’alimentation et de rassemblement en bancs; (3) ils absorbent la chaleur du soleil et peuvent amener la température de l’eau à des niveaux difficiles à supporter pour certaines espèces de poissons; (4) ils peuvent déloger les plantes et des proies des poissons et ainsi avoir des effets importants sur leur alimentation; (5) ils peuvent enfouir et étouffer les œufs de poisson; (6) ils peuvent rendre inutilisables les frayères.

Photo 2.9 Présence de sédiments (gauche) créée par le ruissellement à la suite de la coupe d’un bassin versant forestier où le cours d’eau n’avait pas été protégé par une zone tampon.

Source : Forests Monitor .

L’eau claire de cette photo est celle venant d’un autre bassin versant forestier soumis à la coupe mais qui avait été protégé par des zones tampons.

Photo 2.10 Remplissage de limons dans une rivière de Madasgacar causée par l’érosion des sols à la suite des coupes forestières intensives.

Source : WildMadagascar .

Un ou plusieurs de ces effets peuvent augmenter la vulnérabilité des poissons aux infections et aux maladies, diminuer leur taux de survie, limiter leur capacité à croître et à se reproduire et peuvent même mener à la mort des poissons. Ces effets peuvent également augmenter avec l’apport de contaminants transportés par l’eau de ruissellement.

L’exploitation forestière a également un impact sur les organismes terrestres. L’impact le plus visible est la destruction d’habitats qui oblige les organismes mobiles à se trouver un nouveau milieu où vivre. L’effet de l’exploitation forestière se fait également sentir à l’intérieur de la forêt intacte. Appelé « effet de lisière », cet effet est présent non seulement à la frontière avec le milieu intact, mais peut atteindre pour certains organismes jusqu’à 100 m à l’intérieur de la forêt (Lindenmayer, 2002).

La figure 2.9 illustre la surface de forêt intacte selon la largeur de l’effet de lisière. À la lumière de cette figure, on peut conclure qu’il est préférable de laisser de grands pans (blocs) de forêts entre les aires de coupe (figure 2.10) au lieu de fragmenter  davantage les forêts en laissant des bandes étroites de forêts entre les aires de coupe (figure 2.11). On estime en Amazonie que la superficie affectée par l’effet de lisière  dépasse la superficie de forêt déboisée.

Figure 2.9 Impact de différentes largeurs d’effet de lisière sur la taille de l’habitat d’intérieur.

Source : Tiré de Defenders of Wildlife .

Figure 2.10 Répartition de blocs de coupe qui laisse de grands espaces de forêt entre les aires de coupe.

Source : Tiré de Kimmins (2004).

Figure 2.11 Répartition de blocs de coupe qui favorise la fragmentation de la forêt dans la région de Parent (province de Québec, Canada - 47º 55' 0" Nord 74º 37' 0" Ouest).

Source : Tiré de Google Maps .

Certains animaux sont avantagés par la fragmentation de la forêt. C’est le cas notamment de certains cervidés, tel le cerf de Virginie (Odocoileus virginianus Zimm.), qui trouvent dans les aires de coupe une part importante de leur alimentation (herbes, arbustes).

Les routes créées lors des travaux d’exploitation forestière ont aussi un impact sur les organismes forestiers. En plus de fragmenter davantage la forêt, les routes servent de porte d’entrée à des espèces envahissantes ou à des espèces locales qui n’occupent pas normalement ce milieu. À titre d’exemple, dans la forêt boréale de l’Est canadien, la présence de routes forestières mène à une diminution de la population du caribou des bois (Rangifer tarandus). Les loups utilisent cette porte d’entrée vers de nouveaux territoires et s’attaquent à ce mammifère qui représente une proie plus petite et plus facile à attraper que l’orignal (Alces alces). En Amazonie, les routes créées dans la forêt vierge permettent à la population et à des compagnies d’exploiter de façon légale ou illégale les forêts, facilitent la déforestation pour des fins agricoles et augmente la pression de chasse et le braconnage.

Lorsque l’on évalue l’effet de l’exploitation forestière, il est important d’évaluer la situation à une échelle plus large. Une activité forestière peut avoir un impact sévère à l’échelle locale, mais être nécessaire à l’échelle régionale. À titre d’exemple, les feux de forêt peuvent favoriser l’érosion du sol et le transport de sédiments vers les cours d’eau. Par contre, ces feux avantagent les cervidés de la région étant donné qu’ils entraînent, pendant plusieurs années, la présence de plantes nécessaires à leur alimentation. Ces perturbations peuvent être d’autant plus bénéfiques que les feux créent une situation rare dans la région.

Nous élaborerons davantage, dans le module 5 , sur les impacts des coupes forestières sur la biodiversité terrestre et aquatique et sur les pistes de solutions.

Photo 2.11 Exemple de fragmentation dans l’est de la Bolivie.

Source : Wikipedia .

2.5.2 Les impacts sociaux

L’importance des forêts pour plusieurs communautés et les besoins qu’elles comblent font en sorte que l’exploitation des forêts peut avoir des impacts favorables ou défavorables selon les régions et les classes économiques.

Les impacts favorables

Le premier impact favorable est la création d’emplois associés à l’exploitation forestière et à l’augmentation conséquente du niveau de vie des travailleurs. Ces emplois sont tout d’abord locaux et ils concernent le plus souvent les travaux liés à la planification et à la réalisation des coupes, au transport des billes vers les usines et à une première transformation du bois (ex. le sciage). D’autres transformations du bois et la vente des produits forestiers peuvent également contribuer à la création et au maintien d’emplois dans les grands centres ou à l’étranger.

On estime que le secteur forestier équivaut à 180 millions d’emplois par année, mais seulement le tiers de ces emplois sont officiellement inventoriés (chapitre 9 du volume 1 du MEA ).

Ces impacts sont cependant sujets aux hauts et aux bas de cette industrie. Ces fluctuations sont notamment liées à la vigueur des économies continentales ou mondiales ainsi qu’aux variations dans l’offre et la demande de plusieurs produits non spécialisés comme le bois d’œuvre, le papier journal, etc.

Les pays en voie de développement sont un joueur important dans cette industrie, car non seulement ils contribuent aux augmentations de l’offre, ils permettent également des coûts de production moindres et ils ont des règles environnementales moins sévères que celles des pays industrialisés.

Les changements technologiques ont une influence importante sur la demande. C’est le cas notamment de la demande en papier journal qui diminue avec la présence de plus en plus importante des médias d’information sur Internet.

La construction de routes forestières facilite également l’accès à des ressources qui étaient autrement difficiles ou impossible à atteindre. Ce nouvel accès aux ressources permet la récolte de produits forestiers non ligneux ou d’accéder à de nouveaux territoires pour l’écotourisme.

Photo 2.12 Rubans servant à débiter les grumes.

Source : Wikipedia .

Les impacts défavorables

Les impacts sociaux favorables sont possibles si l’exploitation forestière favorise le développement économique des régions et des pays concernés. Dans le cas contraire, cette exploitation réduit la disponibilité et l’accès aux produits et services habituellement tirés des forêts. Une telle situation devient particulièrement critique pour les communautés autochtones qui ne peuvent pas profiter des emplois créés par l’exploitation et la transformation du bois. Les communautés qui dépendent des forêts pour leur alimentation, leur source d’énergie et leur médication peuvent également se retrouver dans une situation difficile étant donné qu’elles n’ont souvent pas les moyens financiers pour remplacer cette source de biens essentiels.

2.6 La venue de la gestion durable des forêts et de la certification forestière

La gestion des forêts a beaucoup évolué au cours des trente dernières années. D’une gestion dirigée principalement vers l’extraction de quelques ressources, les gestionnaires forestiers ont graduellement ajusté leurs pratiques afin de limiter les impacts de l’exploitation forestière sur les écosystèmes et de répondre aux demandes de plus en plus nombreuses et parfois contradictoires de la population et des groupes de pression.

Encadré 2.1 Gestion des forêts ou aménagement forestier?

Les termes gestion des forêts et aménagement forestier sont souvent utilisés sans égard à leur sens réel. Selon le dictionnaire Larousse , ces deux termes se définissent comme suit :

Gestion : Action ou manière de gérer, d'administrer, de diriger, d'organiser quelque chose.

Aménagement : Arrangement, disposition particulière visant à une meilleure adéquation de quelque chose à sa destination (par exemple, l'aménagement d'un texte de loi).

En termes forestiers, la gestion se réfère aux objectifs que l'on désire atteindre lors de l'exploitation des ressources forestières. L'aménagement, quant à lui, englobe les actions qui doivent être prises afin d'atteindre ces objectifs. Ces actions peuvent être le maintien des services écosystémiques ou d'améliorer la production de produits forestiers.

Source : Le dictionnaire Larousse .

La gestion durable des forêts  est l’élément clé de cette nouvelle façon d’aborder la foresterie. Les sections qui suivent s’attardent sur cette approche de gestion ainsi qu’à l’une de ses retombées, la certification des pratiques forestières.

La définition de la gestion durable des forêts retenue par l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) se lit comme suit :

«La gestion durable des forêts signifie la gestion et l'utilisation des forêts et des terrains boisés d'une manière et à une intensité telle qu'elles maintiennent leur diversité biologique, leur productivité, leur capacité de régénération, leur vitalité et leur capacité à satisfaire, actuellement et pour le futur, les fonctions écologiques, économiques et sociales pertinentes aux niveaux local, national et mondial, et qu'elles ne causent pas de préjudices à d'autres écosystèmes

Cette définition met en évidence la recherche d’un équilibre entre la protection des écosystèmes, les besoins croissants de la population mondiale vis-à-vis des ressources forestières et de la prospérité des communautés actuelles et futures qui dépendent de la forêt.

  • Lisez, à titre introductif, l'article de P. Gareau (2005) à propos des différentes approches de gestion durable des forêts dans le monde. Accédez à cet article en cliquant sur le lien suivant :

2.6.1 L'application de la gestion durable des forêts

L’application de ce mode de gestion exige tout d’abord la mise en place de différentes conditions. Pour les organisations responsables de l’exploitation des ressources forestières, cette approche de gestion implique que ces dernières :

  • préparent et mettent en œuvre des plans d’aménagement pour les produits et services identifiés comme étant les plus importants sur le territoire aménagé;
  • favorisent les échanges entre les parties prenantes lors de la planification des travaux d’aménagement forestier.

Les gouvernements doivent également s’impliquer dans ce processus grâce à :

  • l’appui d’équipes de spécialistes dans les bureaux et sur le terrain qui assureront le suivi des plans d’aménagement;
  • la mise en place d’incitatifs financiers ou autres qui favoriseront des pratiques de gestion durable;
  • la création et l’amélioration continue d’un cadre législatif et réglementaire qui encadre la gestion des ressources forestières et les mécanismes de participation des parties prenantes.

Malgré ces exigences, la transition vers la gestion durable des forêts se fait rapidement. Son application n’est cependant pas uniforme et la conformité des pratiques forestières à ce mode de gestion augmente avec les moyens financiers et techniques des états (FAO, 2008a).

Selon le chapitre 21 du volume 1 du MEA , 89 % des forêts des pays industrialisés et 6 % de celles des pays en voie de développement faisaient l’objet d’un plan d’aménagement formel d’au moins 5 ans. La mise en place de la gestion durable des forêts est appuyée depuis une dizaine d’années par certaines organisations intergouvernementales, civiles ou privées comme l’Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT) et la Convention sur la diversité biologique. Ces organisations aident les pays en voie de développement en définissant des politiques, des critères, des indicateurs ainsi que des guides qui facilitent une application locale de la gestion durable des forêts (chapitre 8 du volume 3 du MEA ). Ces efforts doivent cependant continuer afin de limiter de façon appréciable les effets négatifs des pratiques forestières.

2.6.2 Les critères et les indicateurs de gestion durable

L’application de la gestion durable des forêts doit également se traduire par des résultats concrets sur le terrain. L’approche imaginée pour atteindre ces résultats est d’utiliser des principes, des critères et des indicateurs. Ces éléments peuvent être décrits comme suit :

  • Les principes permettent d’énoncer les orientations que l’on désire prendre afin de gérer de façon durable les forêts;
  • Les critères constituent une première interprétation des principes, car ils représentent les valeurs forestières que l’on désire améliorer ou entretenir;
  • Les indicateurs permettent de préciser davantage les critères et de refléter la réalité en forêt dans des termes quantitatifs, qualitatifs et descriptifs.

Traduits dans une activité de tous les jours, les principes, les critères et les indicateurs peuvent prendre la forme suivante :

Principe 1 : Avoir une habitation propre

Critère 1.1 : État du plancher
- Indicateur 1.1.1 : Présence de morceaux de nourriture sur le plancher
- Indicateur 1.1.2 : Présence de taches sur le plancher
Critère 1.2 : État du réfrigérateur
- Indicateur 1.2.1 : Présence de nourriture périmée
- Indicateur 1.2.2 : …
Critère 1.3 : État de la cuisinière
- Indicateur 1.3.1 : …

Principe 2 : Avoir un style de vie sain

Critère 2.1 : …

Dans cet exemple, l’évaluation du principe « avoir une habitation propre » passe par les critères « état du plancher » et « état du réfrigérateur ». D’autres critères auraient pu être choisis, par exemple « état des chambres à coucher », mais les premiers critères furent jugés plus importants. En ce qui concerne le critère « état du plancher », son évaluation passe par les indicateurs « présence de morceaux de nourriture sur le plancher » et « présence de taches sur le plancher ». À l’instar des critères, d’autres indicateurs auraient pu également être utilisés.

L’encadré suivant présente un exemple de principes, de critères et d’indicateurs utilisés dans la certification des pratiques forestières.

Encadré 2.2 Principe, critères et indicateurs utilisés par le Forest Stewardship Council lors de la certification des pratiques forestières au Canada

Principe 5 - Bénéfices de la forêt - Les activités d’aménagement forestier doivent encourager une bonne utilisation des multiples produits et services de la forêt pour garantir la viabilité économique et un éventail d’avantages environnementaux et sociaux.

Critère 5.2 Les activités d’aménagement forestier et de marketing devraient encourager l’utilisation optimale et la transformation locale des divers produits de la forêt.
- Indicateur 5.2.1 Le requérant recherche la valeur optimale ou la « valeur la plus élevée et la meilleure » pour les produits forestiers.
- Indicateur 5.2.2 On encourage et facilite la transformation sur place et/ou à valeur ajoutée des produits forestiers lorsque c’est possible au plan économique.
Critère 5.3 L’aménagement forestier doit réduire au minimum les déchets occasionnés par la récolte et par la transformation sur place et éviter de causer des dommages aux autres ressources forestières.
- Indicateur 5.3.1 Tout bois marchand et commercialisable est récolté ou laissé sur place pour fournir une diversité structurelle, un habitat pour la faune, ou pour des raisons propres à la sylviculture.
- Indicateur 5.3.2 La récolte et les opérations sylvicoles sont menées de façon à limiter à un niveau acceptable les dommages aux peuplements résiduels, y compris les arbres sans valeur marchande et non commercialisables et les arbres laissés debout en vue d’une récolte ultérieure.

Source : Norme boréale nationale du Forest Stewardship Council . Cliquez sur le lien au bas de la page.

Les travaux réalisés dans le cadre du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992 ont permis d’amener une série de recommandations et de définir des principes liés à la gestion durable des forêts . Les réalités forestières, sociales et économiques étant différentes d’une région à l’autre du globe, diverses organisations étatiques et non gouvernementales ont mis l’épaule à la roue afin de définir des principes, des critères et des indicateurs adaptés à leurs réalités. Les trois groupes dont les travaux sont les plus avancés sont :

  • le Groupe de travail sur les critères et les indicateurs de la conservation et de l'aménagement durable des forêts des régions tempérées et boréales (aussi appelé « Processus de Montréal »);
  • la Conférence ministérielle pour la protection des forêts en Europe;
  • l’Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT).

Bien qu’il existe des différences entre les travaux de ces organisations, elles se partagent sept thèmes communs (FAO, 2008b) :

  1. L'étendue des ressources forestières.
  2. La diversité biologique.
  3. La santé et la vitalité des forêts.
  4. Les fonctions de production des ressources forestières.
  5. Les fonctions de protection des ressources forestières.
  6. Les fonctions socioéconomiques.
  7. Le cadre juridique, stratégique et institutionnel.

Ces éléments communs font eux-mêmes partie de travaux qui mènent à des recommandations de la part du United Nations Forum on Forests .

  • Familiarisez-vous avec les critères et les indicateurs révisés de l'OIBT pour l'aménagement durable des forêts tropicales en cliquant sur le lien suivant :

L’utilisation de principes, de critères et d’indicateurs va au-delà de la mise en place de la gestion durable des forêts. Ces derniers permettent : (1) d’évaluer de façon crédible et indépendante les performances en matière de gestion durable des forêts; (2) d’améliorer les pratiques forestières afin d’assurer le développement durable des ressources forestières; (3) de faciliter le suivi de l'état actuel des forêts et de leur évolution. Ils peuvent être utilisés à l’échelle d’une unité d’aménagement forestier, sur le plan régional ou national (FAO, 2008c). Les défis pour l’implantation de la gestion durable restent difficiles pour plusieurs raisons.

  • Lisez l'article de D. Pearce et coll. (2003) sur la faisabilité de la gestion durable des forêts dans les tropiques : Pearce, D. et coll. 2003. Sustainable forestry in the tropics : Panacea or folly? Forest Ecology and Management 172 : 239-247. Accédez à cet article en utilisant la Réserve électronique du cours  de la bibliothèque de l'Université TÉLUQ.

Fait à noter, les principes, les critères et les indicateurs sont régulièrement mis à jour à la lumière de l’avancement de nos connaissances sur la structure et le fonctionnement des écosystèmes forestiers et de l‘évolution des valeurs de la population envers la forêt. Le chapitre 8 de Évaluation des ressources forestières mondiales 2005 de la FAO (2006) est un exemple de l’utilisation d’indicateurs pour évaluer le niveau de gestion durable des forêts. Vous pouvez y accéder en cliquant sur le lien au bas de cette page dans la liste « Pour en savoir plus sur la gestion durable des forêts ».

2.6.3 La certification des pratiques forestières

L’intérêt grandissant pour la gestion durable des forêts a fait en sorte que des États et des compagnies forestières ont adopté le vocabulaire et les principes de ce mode de gestion. L’adhésion variable à ces principes a toutefois soulevé le scepticisme du public et des organismes environnementaux. Afin de rassurer le public de la qualité des pratiques forestières, et pour stimuler la gestion durable des forêts, divers organismes ont mis en place depuis le début des années 1990 des normes de certification crédibles et indépendantes.

On retrouve deux catégories d’organismes de certification. Un premier groupe est issu d’initiatives d’États qui désirent démontrer que les pratiques forestières réalisées chez eux correspondent à des normes formelles de gestion forestière. La Finlande, le Canada, le Brésil ainsi que la Malaisie font partie de ce groupe. Bien que les règles soient édictées par ces États, plus d’une vingtaine de ces organismes ont vu reconnaître leurs normes par le PEFC Council , un organisme non gouvernemental, indépendant et sans but lucratif qui fait la promotion de la gestion durable des forêts. Les organismes de certification du second groupe, quant à eux, ont vu le jour grâce à des initiatives d’organisations indépendantes. Les normes sont le plus souvent définies par l’organisme et leur respect est assuré sur une base régulière par des auditeurs indépendants. Le Forest Stewardship Council (FSC) et la Sustainable Forestry Initiative (SFI) font partie de ce groupe.

Malgré la variété de normes de certification disponibles, aucune d’entre elles ne se démarque à l’échelle internationale. Ceci s’explique par le fait que ces normes répondent à des besoins particuliers. Dans le cas de la certification de l’Organisation internationale de normalisation (ISO 14001) par exemple, une entreprise se voit octroyer sa certification pour autant qu’elle s’engage dans l’amélioration continue de ses pratiques et qu’elle respecte les objectifs qu’elle s’est donnés. Dans le cas du SFI, les pratiques du requérant doivent suivre des standards prédéfinis qui mettent l’accent sur la protection de l’environnement et la pérennité des ressources forestières. Enfin, dans le cas du FSC, le respect des communautés autochtones et non autochtones, de la biodiversité et de la pérennité des ressources forestières ont un poids égal lorsque vient le temps d’octroyer la certification.

Les avis sur la pertinence de l’une ou l’autre des certifications sont évidemment partagés. Certains groupes comme les environnementalistes encouragent la certification du FSC. Par contre, les industriels peuvent favoriser dans un premier temps la norme ISO étant donné que leurs dirigeants et les membres de leurs conseils d’administration sont plus familiers avec cette norme.

Au-delà des différences entre les normes et de leur application, qu’en est-il de leur impact sur la gestion des ressources forestières? Il appert que la certification des pratiques forestières améliore les pratiques sur les territoires certifiés. Cette amélioration est cependant observable dans les pays développés où l’on retrouve 90 % des 300 millions d’hectares de forêts certifiées (FAO, 2009). Cette différence avec les pays en voie de développement est importante parce que les investissements qu’il faut consentir (dans l’ordre de quelques centaines de milliers de dollars pour de grands territoires en forêt boréale) ainsi que les besoins en main-d’œuvre spécialisée pour mettre en place et assurer le respect des normes sont jugés élevés. La réticence de certifier les territoires vient également du fait que les gains espérés en valeur des produits certifiés ne se sont pas matérialisés. Pour l’instant du moins, l’acquisition de la certification permet l’accès à des marchés spécialisés des pays développés (chapitre 9 du volume 1 du MEA ).

Photo 2.13 Meubles de cuisine faits à partir de bois certifié.

Source : Forest Stewardship Council .

Photo 2.14 Aménagement forestier dans une forêt certifiée.

Source : Forest Stewardship Council .

2.7 Les études de cas

Les quatre études de cas choisies vous permettront d'étudier plus en profondeur la mise en œuvre de critères et d'indicateurs en forêt tropicale africaine, les pistes de solutions pour contrer la déforestation de la forêt tropicale d'Amérique du Sud et d'Asie, ainsi que le zonage fonctionnel comme principe opérationnel pour la conservation des forêts et la biodiversité qu'elles abritent.

2.7.1 Le développement de critères et d’indicateurs d’aménagement durable en forêt africaine

L'étude de cas de R. Eba’a Atyi et S. Johnson (2005) présente les résultats préliminaires de travaux et leurs impacts dans le cadre d’un projet visant la mise en œuvre de critères et indicateurs dans dix pays africains. Vous constaterez les étapes à suivre pour qu’un plan de gestion efficace soit mis en place.

  • Lisez l'article de R. Eba’a Atyi et S. Johnson (2005). Accédez à cet article en cliquant sur le lien suivant :

Cela étant dit, la certification de la gestion des forêts tropicales en Afrique ou ailleurs évolue très lentement. Dans l'article suivant, G. Buttoud et A. Karsenty (2001) propose quelques explications.

  • Lisez l'article de G. Buttoud et A. Karsenty (2001). Accédez à cet article en cliquant sur le lien suivant :

2.7.2 La protection du patrimoine forestier au Panama

L'étude de cas de S. Bilodeau Gauthier et P. Côté (2005) présente les principales causes de la déforestation au Panama et des enjeux écologiques. Elle fait aussi référence aux outils disponibles pour remédier aux problèmes. Vous constaterez que les technologies en place sont tout à fait aptes à résoudre le problème, mais, pour plusieurs raisons, celles-ci ont été peu efficaces au cours des années. Nous reviendrons sur certaines pistes de solutions au module 4 .

  • Lisez l'article de S. Bilodeau Gauthier et P. Côté (2005). Accédez à cet article en cliquant sur le lien suivant :

2.7.3 Les plantations de Leucaena leucocephala aux Philippines pour la production d’énergie (bioénergie) – une solution pour dynamiser le marché de l’emploi et protéger la ressource forestière

L’ipil-ipil (Leucaena leucocephala) fait partie des espèces d’arbres qui sont utilisés comme source d'énergie aux Philippines. L’étude de cas de E. M. Remedio (2002) porte sur la culture du l'ipil-ipil dans la province insulaire de Cebu pendant une décennie. Il fait état du niveau très élevé de déforestation depuis un siècle mais aussi des efforts récents pour développer une industrie du bois-énergie.

  • Lisez l'article de E. M. Remedio (2002). Accédez à cet article en cliquant sur le lien suivant :

2.7.4 Le zonage fonctionnel et les plantations d'espèces d'arbres à croissance rapide pour le maintien de la production de fibre et la conservation de la biodiversité

Les espèces à croissance rapide peuvent produire, dans un contexte de sylviculture intensive, beaucoup plus de fibre que la forêt naturelle ou la forêt semi-aménagée. Certains chercheurs proposent que l'usage des plantations d'arbres et les technologies favorisant la venue de la ligniculture puissent être bénéfiques pour l'industrie forestière et la conservation de la biodiversité. Nous proposons ici la lecture de deux articles à ce sujet.

  • Lisez l'article de C. Messier et coll. (2003). Accédez à cet article en cliquant sur le lien suivant :
  • Lisez le second de A. Paquette et C. Messier (2010) : Paquette, A., Messier, C. 2010. The role of plantations in managing the world’s forests in the Anthropocene. Frontiers in Ecology and the Environment 8 : 27-34. Accédez à cet article en utilisant la Réserve électronique du cours  de la bibliothèque de l'Université TÉLUQ.

Références

Anonyme. 2000. Global Distribution of Current Forests. United Nations Environment Programme. lien .

Anonyme. 2004. Termes et définitions portant sur les tableaux nationaux de FRA 2005. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts. lien .

Anonyme. 2007. Forest biome. Encyclopedia of Earth. lien .

Barnes, B.V. et coll. 1998. Forest ecology. John Wiley and Sons, New York.

FAO 2001. Situation des forêts du monde 2001. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts, 181 p. lien .

FAO 2005. Évaluation des ressources forestières mondiales 2005 - Les 15 résultats principaux. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts, 8 p. lien .

FAO 2006. Évaluation des ressources forestières mondiales 2005 - Progrès vers la gestion forestière durable. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts, 320 p. lien .

FAO. 2008a. Promotion de la gestion durable des forêts et des terres boisées. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts. lien .

FAO. 2008b. Comment définir les critères et indicateurs de gestion durable des forêts? Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts. lien .

FAO. 2008c. Processus internationaux relatifs aux critères et indicateurs de gestion durable des forêts. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts. lien .

FAO 2009. Situation des forêts du monde 2009. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts, 152 p. lien .

Lindenmayer, D. B., Franklin, J. F. 2002. Conserving biodiversity: a comprehensive multiscaled approach. Island Press, Washington DC.

Mery, G. et al. 2005. Des Forêts pour le Nouveau Millénaire - des forêts à gérer dans l'intérêt des gens et la nature. Ministère des Affaires étrangères de Finlande et l'Union internationale des instituts de recherches forestières, 36 p. lien .

Nabuurs, G. J. et coll. 2007. Forestry. Dans Climate Change 2007: Mitigation. Contribution of Working Group III to the Fourth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change. B. Metz, O. R. Davidson, P. R. Bosch, R. Dave et L. A. Meyer (éd.), Cambridge University Press, Cambridge, United Kingdom and New York, NY, USA. pages 541-584.lien .

Smart, L. B. et coll. 2005. Genetic improvement of shrub willow (Salix spp.) crops for bioenergy and environmental applications in the United States. Unasylva 56 : 51-55.

Pour en savoir plus sur la gestion durable des forêts

Anonyme. 2005. Critères et indicateurs. Groupe de travail du Processus de Montréal. lien  (sélectionnez le lien Revised criteria and indicators)

Anonyme. 2006. Chapitre 8 - Progrès vers la gestion forestière durable. Dans Évaluation des ressources forestières mondiales 2005 - Progrès vers la gestion forestière durable. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts. Rome. pp. 129-148. lien 

Anonyme. 2008. Critères et indicateurs d'aménagement durable des forêts. Ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec. lien 

Anonyme. 2009. Critères et indicateurs de l'aménagement forestier durable au Canada. Conseil canadien des ministres des forêts. lien 

Anonyme. 2009. C&I ToolBox Series. Center for International Forestry Research. lien .

Anonyme. 2009. Orientations & lignes directrices. Organisation internationale des bois tropicaux. lien 

FAO. 2009. Documents de travail Vers la durabilité. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Département des forêts. lien 

Ramakrishnan, P. S. 2007. Traditional forest knowledge and sustainable forestry : A north-east India perspective. Forest Ecology and Management 249 : 91–99.

Chun, Y. W., Tak, K.-I. 2009. Songgye, a traditional knowledge system for sustainable forest management in Choson Dynasty of Korea. Forest Ecology and Management 257 : 2022–2026.

********************************************************** *************************** FRQNT ************************ **********************************************************

Le CEF est un
regroupement stratégique du

********************************************************** *********************** Infolettre *********************** **********************************************************

Abonnez-vous à
l'Infolettre du CEF!

********************************************************** ******************** Colloque du CEF ********************* **********************************************************

********************************************************** ************** Formations et Écoles d'été **************** **********************************************************

Formations et Écoles

Analyse de pistes pour écologistes 
Cours intensif ECL805 enseigné par Bill Shipley.
2 - 7 juin 2024
Université de Sherbrooke
Summer School in Evolutionary Ecology and Biology 2024 
Pedagogical coordinator is Adam Ali.
24 juin - 3 juillet 2024
Campus Triolet, Montpellier, France

********************************************************** ********** Colloque Développement durable UQAC *********** **********************************************************

********************************************************** **************** Balcony Garden Project ****************** **********************************************************

********************************************************** ********* Mémoire CEF Changements Climatiques ************ **********************************************************

********************************************************** ***************** Pub - Symphonies_Boreales ****************** **********************************************************